SYLVOTHÉRAPIE : COMMENT SE PASSE UN BAIN DE FORÊT ?

Sylvothérapie : comment se passe un bain de forêt ?
Cet article est le second d’une série de six articles sur la sylvothérapie. Le premier présentait la sylvothérapie sous un angle théorique : Qu'est-ce que la sylvothérapie ? Ce second aborde concrètement comment se passe une séance de bain de forêt.

Prendre un bain de forêt

Quels sont les aspects logistiques à considérer ?


  • Un bain de forêt a lieu en groupe en forêt. La sortie peut aussi se faire dans un parc ou même un jardin tant que le lieu comporte suffisamment d’éléments de nature et de sollicitations sensorielles issues du monde non-humain. Le groupe est en général composé de 6 à 12 personnes, parfois moins, parfois plus, rarement plus de 16.


  • La durée d’un bain de forêt classique est de 2 à 4 heures. Des séances courtes de sylvothérapie peuvent aussi avoir lieu, avec l’intention de créer une courte période d’immersion dans la zone de satoyama, cet espace liminal, entre le monde cadencé habituel et la « wilderness » [i]. Cela peut aussi se faire sur une heure, même si l’immersion sera nécessairement moins profonde.


  • Plus les participants pratiquent, et plus ils se reconnectent à la nature et à eux-mêmes rapidement, car cette activité, comme toutes les disciplines, se « muscle » par l’expérience.
    Des durées plus importantes (une journée, plusieurs jours) amènent a contrario des bénéfices plus profonds, qui s’ancrent durablement. L’avantage d’une immersion de plus d’une journée est que les participants vont faire l’expérience de la nuit. Ils vont également vivre les moments qui encadrent la nuit : le crépuscule, l’aube, l’aurore. Durant toutes ces heures inhabituelles, les ambiances (lumières, sons, température, humidité) et la faune changent radicalement, provoquant d’autres stimulations et d’autres émotions.


  • Dans les bains de forêts de plusieurs jours, il est conseillé, si c’est possible, de dormir en pleine forêt et de prendre tous les repas en forêt. Toute coupure comme reprendre des véhicules, entrer dans un bâtiment, regarder un écran, reviendrait à considérer que le bain de forêt se termine au début de la coupure et qu’un nouveau bain de forêt commence lorsque la coupure s’achève.


  • Les participants marchent peu dans un bain de forêt car ce n’est ni une randonnée ni une sortie naturaliste. La posture statique est privilégiée : debout, assis, couché, adossé contre un tronc, vautré dans l’herbe, assis sur une branche, etc.


  • Lorsque des déplacements se font, c’est souvent en silence et à vitesse réduite, mais pas systématiquement, cela dépend des invitations. D’une manière générale, le recueillement, la pleine attention et la lenteur facilitent la connexion. Pour donner un ordre de grandeur, la vitesse moyenne d’un bain de forêt est entre 500 et 1000 m de distance par heure de pratique, même si certaines heures peuvent être passées au même endroit.


  • Que se passe-t-il selon les conditions météorologiques ?


    Le bain de forêt peut se faire à n’importe quelle saison. Lorsque les conditions climatiques sont froides, humides, neigeuses, pluvieuses, ou caniculaires, l’ambiance est à chaque fois différente, et offre quelque chose de spécifique aux participants.

    A titre d’information, en Colombie Britannique (Canada), où les hivers sont rudes, l’école Wolf [ii] reste ouverte, et a lieu en pleine forêt, trois jours par semaine, toute l’année. Les enfants vivent des invitations de type "sit-sport" (cf. paragraphe suivant) consistant à rester immobile au même endroit. Chacun va à « son » endroit tous les matins pendant une demi-heure pour se centrer et écouter ce qui est vivant à l’extérieur et à l’intérieur de soi avant de commencer la journée de classe. Et ce, même sous la neige ou une grosse pluie.

    Il n’y a qu’une mauvaise condition : lorsqu’il y a tellement de vent que la sécurité est en jeu. Dans ce cas, la sortie est soit modifiée et déplacée vers un lieu abrité du vent, soit repoussée.

    En Allemagne et aux Pays-Bas, on dit à propos des cyclistes et de la météo souvent maussade : « il n’y a pas de mauvaises conditions, il n’y a que des mauvais équipements » ! A charge pour les participants d’emmener le nécessaire pour ne pas être trop hors de leur zone de confort, et pour le guide d’être clair dans les consignes de préparation en amont.
    Contrairement aux idées reçues, avoir froid ne fait pas tomber malade. C’est la manière dont on le gère (ou pas) qui peut avoir des effets délétères sur l’organisme [iii]. Avoir froid aux pieds, par exemple, permet d’être plus en contact de son corps et de se sentir plus vivant, même si ce n’est pas confortable. L’essentiel est de pouvoir les remettre au chaud à court terme.

    Comment se déroule un bain de forêt ?


    Tels que certifiés par l’ANFT (Association Nature and Forest Therapy), les bains de forêt suivent une trame standard, validée par des dizaines d’années et des milliers de bains de forêt d’expérience, avec des invitations « imposées » (dans le sens « figure imposée »).
    Ces invitations sont destinées à créer ce fameux seuil de connexion et des espaces de liberté pour le guide, pour faire vivre une connexion avec la nature en fonction de l’humeur du groupe, des conditions du lieu, des conditions météo, et du temps disponible.

    Quelques exemples d’invitations


    Bien que ces processus doivent d’abord se vivre pour comprendre à quel point ils sont efficaces, nous tentons ici d’en décrire quelques-uns. Pour mémoire, il en existe plusieurs dizaines et chaque guide crée les siens. Une invitation doit être simple, ouverte et sensorielle pour être puissante.
  • S’il y a de l’eau, par exemple, le guide va proposer aux participants des manières simples d’interagir avec l’eau, avec le plus de sens possible. Dans les cas où l’eau est potable, les 5 sens peuvent même être sollicités. Pour l’ouïe, cela pourrait consister à écouter l’eau couler si elle est vive, ou à faire des clapotis avec les paumes si elle est calme.


  • Une des invitations destinées à créer le seuil de connexion est une méditation guidée, debout et yeux fermés, pour prendre finement conscience de tous ses autres sens.


  • Une autre, relativement « standard » est le sit spot, traduit en français par « place médecine ». Il s’agit de se laisser guider par son intuition, laisser ses pieds aller où bon leur semble, et de s’arrêter lorsqu’un endroit particulier nous « appelle », puis d’y rester sans rien faire, en observant cet endroit, et ce qu’il nous « dit » c’est-à-dire ce qu’il se passe en nous quand nous l’observons, là encore avec tous nos sens.


  • Ce qu’il se passe en nous est la somme de nos ressentis corporels, de nos émotions et de nos pensées. Il y a toujours des pensées, et il y a toujours une place pour elles. Ces pensées, au même titre que les sensations et que les émotions, sont précieuses et nous renseignent sur l’endroit et ce qu’il nous fait. Nous aurions eu d’autres pensées à un autre endroit.

    Tout bain de forêt « ANFT compatible » se termine par une cérémonie du thé.


    Il s’agit d’une invitation solennelle, avec une dimension sacrée, basée sur la philosophie – simplifiée - de la cérémonie du thé japonaise traditionnelle, le Wabi-sabi.
    L’intention est de permettre aux participants de rencontrer la forêt par le goût et de l’incorporer par la dégustation consciente d’une infusion faite avec des plantes du lieu, cueillies pendant le bain de forêt. Il s’agit de plantes évidemment 100% sûres (le guide est formé à les identifier sans aucun risque d’erreur) et souvent à vocation thérapeutique ou gourmande, ou les deux, pour joindre l’utile à l’agréable. Quelques exemples : l’aïl des ours, l’alliaire, le pissenlit, l’ortie, l’achillée, l’aubépine, le tilleul, le cynorrhodon…
    Le bain de forêt se termine par cette cérémonie.

    Les participants retournent ensuite dans leur vie quotidienne, c’est le moment de l’incorporation. Ils ramènent avec eux leur reconnexion à l’essentiel, et l’offrent autour d’eux au monde cadencé, qui en a bien besoin !

    Par Serge Mang-Joubert
    - Guide en sylvothérapie / facilitateur en forêt

    Bibliographie / webographie :
    i Cf. chapitre précédent de cette série
    ii Cécile Faulhaber , Documentaire « L’Autre Connexion » - http://troisiemeoption.org
    iii Pour creuser ce sujet, expérimenter un stage de yoga du froid (ou Toumo) (http://yoga.rabourdin.com).

    Voir la page de Serge Mang-Joubert

    Les commentaires

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    Diagnofit

    07 septembre 2022

    Je trouve cela génial comme concept ! J'aimerais vraiment essayer mais je ne sais pas trop auprès de qui me tourner pour me guider...

    avatar

    Intentionné

    07 septembre 2022

    Bonjour, vous pouvez contacter Serge Mang-Joubert, l’auteur de l’article. Cordialement


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    L'auteur

    Serge Mang-Joubert

    Guide En Sylvothérapie / Facilitateur En Forêt

    Informations

    Genre : Découverte

    Tag : Blog thérapies naturelles

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